La mise en demeure permet à un créancier d’obliger son débiteur à respecter sa part du contrat (paiement, livraison,…). Pour l’effectuer, le créancier doit pouvoir prouver que sa créance existe, qu’elle est liquide et qu’elle est arrivée à échéance. C’est un acte officiel et formel qui doit respecter certaines règles : elle doit être délivrée par lettre recommandée avec accusé de réception ou bien par acte d’huissier et doit contenir certaines mentions obligatoires sous peine d’être qualifiée d’informelle et d’être sanctionnée par la nullité.

Définition de la mise en demeure :

La mise en demeure est un acte officiel et formel de la procédure de recouvrement d’une créance impayée. Elle est définie par l’article 1344 du Code Civil.

C’est un acte par lequel le créancier somme son débiteur de s’exécuter en accomplissant une obligation à laquelle il s’est soumis dans un contrat. Cette obligation peut prendre plusieurs formes. Par exemple : payer la somme due, terminer un travail commencé mais pas achevé, livrer des marchandises.

Objectif de la mise en demeure :

L’objectif de la mise en demeure est de pousser le débiteur à s’exécuter en lui mettant la pression avec la menace d’une action en justice s’il ne le fait pas. On veut l’inciter à agir afin de parvenir à une résolution amiable du litige. Il s’agit donc d’un moyen de pression et en aucun cas d’une contrainte qui pèserait sur le débiteur.

Parfois, la mise en demeure peut aussi être une condition à l’ouverture d’une procédure. En effet, dans certains cas, la loi exige qu’une mise en demeure soit présentée au débiteur avant d’introduire contre lui une action en justice.

Conditions de la mise en demeure :

Pour qu’une mise en demeure soit possible, la créance concernée doit remplir certaines conditions cumulatives, au nombre de trois :

Caractère certain de la créance :

Dire que la créance doit être certaine signifie que l’existence de cette créance doit pouvoir être prouvée. Généralement, c’est une facture qui va permettre d’établir ce caractère certain de la créance.

Caractère liquide de la créance :

Une créance est liquide lorsqu’elle est évaluée en argent (généralement dans la monnaie ayant cours dans le pays concerné comme l’euro pour la France) ou lorsque son titre contient tous les éléments qui permettent une telle évaluation monétaire. Seule une créance revêtant ce caractère peut faire l’objet d’une mise en demeure.

Caractère exigible de la créance :

Une créance est exigible dès lors que son terme est arrivé à échéance. Elle ne peut être réclamée que lorsque la date à laquelle elle devait être payée ou exécutée est arrivée. Avant cette date, aucune mise en demeure efficace n’est possible.

Exemple : Une créance arrive à échéance le 30 mars. Le 29 mars, aucune mise en demeure n’est possible. A partir du 30 mars, une mise en demeure est possible par le créancier.

Effets de la mise en demeure :

La mise en demeure est un acte important dans la procédure de recouvrement. Ses effets sont multiples.

Intimidation du débiteur :

L’effet premier, si la mise en demeure est efficace, est de faire peur au débiteur et de l’inciter à s’exécuter dans le délai imparti afin d’éviter une action en justice. C’est l’effet principal recherché.

Point de départ des intérêts ou du poids de la charge sur le débiteur :

Dans le cas d’une obligation de payer, la date de la mise en demeure sert de point de départ des intérêts moratoires. C’est à partir de ce jour que les intérêts courent, jusqu’au jour de l’exécution de l’obligation. Ce point a son importance car il permet le calcul des intérêts dus par le débiteur au créancier.

Dans le cadre d’une obligation de livrer des marchandises, le jour de la mise en demeure est le jour à partir duquel les risques de la chose pèsent sur le débiteur, sauf s’ils pesaient déjà sur lui. Les risques sont donc exclusivement à la charge du débiteur à compter de ce jour.

Mode de délivrance de la mise en demeure :

La mise en demeure peut être délivrée au débiteur par deux voies différentes :

Délivrance par courrier :

La mise en demeure peut être délivrée au débiteur par courrier. Toutefois, il est exigé dans ce cas de le faire par lettre recommandée avec accusé de réception. En effet, cela sécurise le processus en assurant une bonne réception du courrier par le destinataire. L’avis de réception faisant foi, le courrier prouve la date de réception. Avec ce processus, le débiteur ne peut pas se targuer de ne pas avoir reçu la mise en demeure.

Délivrance par acte d’huissier :

L’autre façon de délivrer une mise en demeure est le recours à un huissier de justice. Il suffit de se rendre chez un huissier et de lui prouver l’obligation non exécutée par le débiteur (à l’aide d’une facture par exemple). L’huissier peut alors rédiger un acte qu’il délivre lui-même au débiteur, en mains propres. Là encore, la sécurité est accrue et le risque de perte du courrier ou de mauvaise foi du débiteur qui prétendrait ne pas avoir reçu la mise en demeure est totalement écarté.

Choix du mode de délivrance :

En principe, le mode de délivrance de la mise en demeure reste au libre choix du créancier. Lui seul décide d’avoir recours à un huissier de justice ou de se contenter d’envoyer un courrier recommandé avec accusé de réception.

Cependant, il existe des cas où la loi impose un acte d’huissier de justice. Par exemple : dans le cas d’une mise en demeure pour refus de renouveler un bail, le code de commerce impose une mise en demeure par acte d’huissier.

Contenu obligatoire de la mise en demeure :

La mise en demeure doit respecter des règles de forme. Elle doit notamment contenir des données imposées : date de rédaction, coordonnées du destinataire, exposé de la situation litigieuse, demande de résolution du litige par l’exécution de l’obligation du débiteur, délai dans lequel la situation doit être régularisée, coordonnées et signature de l’expéditeur.

La mise en demeure doit également contenir impérativement l’expression « mise en demeure ». Cela permet d’être clair et permettre une certaine transparence. De cette manière, le débiteur ne peut pas opposer un manque de compréhension du document puisque l’intention du créancier de mettre en demeure est clairement exposée.

Qui peut utiliser la mise en demeure ?

Tout le monde peut utiliser le mécanisme de la mise en demeure. Aucune exigence particulière n’est posée. Les mineurs et les majeurs protégés (tutelle, curatelle) peuvent également mettre en demeure leur débiteur. Une possibilité est posée pour les créanciers qui le souhaitent : ils peuvent se faire assister d’un avocat, d’un huissier de justice par exemple. Mais ceci reste une possibilité, ce n’est en aucun cas une obligation qui pèse sur eux.

Sanction d’une mise en demeure informelle :

Une mise en demeure informelle est une mise en demeure qui ne respecte pas une règle importante qui lui est pourtant applicable. Dans, ce cas, il apparaît logique qu’il y ait une sanction car le respect des règles est indispensable au vu de l’importance de l’acte de mise en demeure.

Le risque encouru est la nullité. Mais pour cela, il faut se trouver dans l’un des trois cas suivants :

La mise en demeure vise plusieurs destinataires mais l’un d’eux n’est pas désigné dans l’acte, par oubli.
La mise en demeure d’avoir à payer des loyers est adressée à l’un seul des deux époux concernés.
La mise en demeure est adressée à un chef d’entreprise qui a été dessaisi de son pouvoir de diriger l’entreprise dans un jugement de liquidation judiciaire.
Dans ces trois cas, la mise en demeure est frappée de nullité et elle est donc privée de ses effets.

Abus du créancier et défense du débiteur :

Si le créancier semble avoir tous les pouvoirs pour recouvrer sa créance impayée, en réalité il n’en est rien. Son pouvoir connaît des limites. En effet, la mise en demeure n’est qu’un moyen qui lui est offert de tenter de recouvrer sa créance sans avoir à passer par la voie judiciaire. Toutefois, le créancier ne doit pas abuser de ce pouvoir. C’est pourquoi, en cas d’abus, le débiteur peut avancer ce caractère abusif de la mise en demeure en démontrant que le créancier s’en est servi outre mesure (mises en demeures qui se multiplient, harcèlement, mise en demeure sans fondement, etc.). Dans des cas comme le harcèlement, une action en justice peut même être intentée par le débiteur contre le créancier. La mise en demeure est donc un acte utile mais à consommer avec modération et prudence.